MAROC – LA VALLEE DU DRAA

5398929470_258f370a7f_zDate : Décembre 2010
Départ : Marrakech
Itinéraire : Tizi Tichka, Ouarzazate, Agdz, Zagora, M’hamid, Foum Zguid, Taznakht, Aoulouze, Tizi-n-test
Arrivée : Marrakech
Distance : 1 366 km
Nombre de jours : 13
Les photos sur: Flickr

Ce voyage a très mal commencé.

J’avais pourtant mis au point un super plan. Départ pour Agadir le vendredi 24 décembre par un vol très matinal et retour du même endroit le lundi 10 janvier par le vol du soir. Bref, 18 jours de vélo sans trop déborder de la période prévue pour mes vacances.

L’itinéraire également avait été étudié pour combiner les zones touristiques incontournables, des pistes interminables et même des journées sans bagages pour découvrir des voies pas trop accessibles.

Bref, le voyage s’annonçait grandiose, mais c’était sans compter sur la neige !

Le 24 décembre, pour le plus grand plaisir des amateurs, ce fut le premier Noël Blanc depuis de nombreuses années. Résultat des courses, tous les vols du matin ont été annulés… dont le mien.

A midi, je me suis retrouvé à la maison quand j’aurais du être en train de remonter mon vélo à l’aéroport d’Agadir… Autant dire que j’avais le moral dans les talons.

Après un petit passage par le bureau (c’est le genre de situation où être agent de voyages aide beaucoup) et avoir étudié toutes les alternatives pour rejoindre le Maroc au plus tôt, j’ai fini par trouver un vol direct à destination de Marrakech au lieu d’Agadir initialement prévu.

Dans la bagarre, j’ai perdu 5 jours de vélos et les nouveaux billets ont coûté beaucoup plus cher que ceux prévus initialement … mais au moins j’étais en route.

En attendant l’avion, j’ai pu étudier un nouvel itinéraire. L’objectif restant de visiter la Vallée du Draa et d’atteindre le début du désert.

Rejoindre la vallée du Draa au départ de Marrakech implique de traverser le Haut Atlas par l’un des 2 plus grands cols du Maroc : Le Tizi Tichka ou le Tizi-n-Test. Pourquoi pas le premier à l’aller et l’autre au retour ? Le genre de challenge idéal pour me remonter le moral.

maroc 2010

Jour 1 : Marrakech – Toufliht : 83 km

A 09h00, le 27 décembre me voici donc enfin prêt à donner le premier coup de pédale mais encore faut-il quitter Marrakech.

Pour éviter de traverser la Médina, j’ai contourné la ville pour prendre la direction du Tizi Tichka et de Ouarzazate. A hauteur du Golf Royal, j’ai pris la route 2012 qui permet d’éviter une longue portion de la N9.

Jusqu’à Ait Ourir, la N9 n’est pas très agréable. Après, c’est beaucoup mieux bien qu’il y ait pas mal de trafic. En faisant attention de ne pas gêner les camions, la route n’est pas trop dangereuse.

La journée s’est terminée par un col à 1400 mètres d’altitude. Il n’est pas trop difficile. Les difficultés sont plutôt venues du soleil qui était très lumineux et commençait à chauffer sérieusement. Le contraste avec la tempête de neige des jours précédents était impressionnant. Mes lunettes de soleil étaient bien sûr au fond d’une de mes sacoches, mais laquelle ? Je n’ai pas eu le courage d’entreprendre une fouille systématique. Les premiers jours, c’est toujours un peu le bordel dans les sacoches !

Le village de Touflith est situé à la fin de la descente de ce premier col. Il est idéalement situé pour entreprendre l’ascension du Tizi Tichka le lendemain et, en plus il y a une auberge. Ce n’est pas le grand luxe. Il n’y a pas de lumière dans la seule douche disponible. C’est une excellente excuse pour s’en passer car elle n’est vraiment pas très accueillante.

Pour le dîner, je m’offre mon premier (et pas dernier) tajine du voyage. Le restaurant de l’auberge est désert. Il y a juste un gaillard un peu sinistre dans un coin qui sirote un thé au coin du feu. Malgré le feu, il fait très froid car la porte d’entrée est grande ouverte. C’est quand même l’hiver à plus de1200 mètres d’altitude. Je passe donc la soirée en tête à tête avec mon tajine en regardant la TV qui diffuse une émission d’une chaîne américaine traduite en arabe.

Ce qui me plait dans le voyage à vélo, c’est que le soir la fatigue prend vite le dessus. Cette soirée qui aurait du être bien sinistre s’est rapidement terminée dans le chaleur de mon sac de couchage. J’ai été aussi peu tenté par les draps que par la douche….

Jour 2 : Toufliht – Ourzazate : 143 km

Finalement, je n’ai pas bien dormi. Le vent a soufflé toute la nuit. Les volets n’ont pas arrêté de claquer. La direction du vent ne présageait rien de bon pour le lendemain.

Le matin, le vent semblait s’être calmé mais c’était juste une impression. Dans le col, je vais avoir de multiples occasions de m’en rendre compte.

Jusqu’à Taddert, la route est facile. Dans le village, je ralentis pour trouver un magasin où acheter du pain. Trouver n’est pas le bon mot car il n’y a plein des petites épiceries et des restaurants (marocains) partout.

A cette heure matinale, je suis le premier et le seul touriste. A peine arrêté, je suis déjà fort sollicité. Je n’ai pas trop suivi ce qui s’est passé mais il n’a pas fallu 2 secondes pour que je me retrouve avec deux pains frais entre les mains. Je les ai payé dans une épicerie mais c’est le gars du resto d’en face qui les a amené… et pas de son restaurant (pas simple à suivre tout cela). Ils semblaient tous contents et moi aussi car j’ai payé le bon prix (pour un touriste).

C’est à Taddert que commence vraiment le col. C’est également à la hauteur de ce village que la route est fermée quand il y a trop de neige. Aujourd’hui, le ciel est entièrement bleu. Pas de neige à l’horizon. Il ne semble pas y en avoir souvent de la neige et quand il y en a, la route doit être rapidement dégagée. Il y a plusieurs chasse-neiges garés à la sortie du village.

Les derniers kilomètres de la montée sont une succession d’épingles à cheveux entrecoupés de longues lignes droites. Dans un sens, avec l’aide du vent, j’avançais à une vitesse incroyable. Dans l’autre j’ai du mettre plus d’une fois le pied à terre. Plusieurs rafales m’ont presque envoyé dans le précipice…

Pour compliquer les choses, juste avant le sommet, mon pneu arrière a littéralement explosé. Je dois avouer que mes pneus avaient déjà plus de 7000 km. Je pensais qu’en inversant l’avant et l’arrière, ils pourraient encore tenir au moins 1500 km (c’étaient des Marathon XR 1.6). Et bien non, à l’endroit d’une grosse crevaison que j’avais eue en Argentine, le pneu s’est petit à petit déchiré. La chambre à air n’a pas résistée et…boum !

Après une réparation de fortune (une rustine à l’intérieur du pneu, deux couches de « power tape » par-dessus et pas trop de pression) me voilà reparti, avec l’obligation de trouver un nouveau pneu le plus rapidement possible.

Au sommet, je m’arrête pour faire la traditionnelle photo. Malheureusement, cet endroit est infesté de boutiques de souvenirs.

Je suis à peine arrêté que je me retrouve affublé d’un nouvel ami: J’ai habité en Belgique, ma femme est belge, j’ai plein d’amis belges, je donne toujours un cadeau aux belges qui passent par ici, etc., etc… Je pense directement : Cause toujours tu m’intéresse, mais quand il me propose un thé, je me laisse tenter. Je viens quand même de me taper un col de 2260 mètres d’altitude et j’ai un peu (énormément) soif. Peut être est il vraiment sympa ?

Malheureusement, le thé est froid et le gars très collant. Après m’avoir montré les photos de sa femme, il me « donne » un chèche « made in China »… Normalement, je le vends à 60.00 EUR (!!) mais pour toi c’est cadeau et il me le met dans la poche. Tu dois juste me donner quelques EUR pour prendre la métro quand je rentre à Paris (tiens, ce n’est déjà plus Bruxelles). J’ai beau lui expliquer pour la vingtième fois que je ne veux pas de cadeau et que je ne vais rien acheter car je voyage léger mais rien n’y fait.

Arrivent 3 jeeps pleines à craquer (les gens en jeep ont plus de moyen que ceux à vélo, c’est bien connu). Mon nouvel ami me laisse enfin tomber tout en me lâchant un sympathique: « Les belges, c’est comme les hollandais, vous êtes tous des radins ». J’espère que tous les marocains ne sont pas comme lui…

J’avais prévu de prendre la direction de Ait Ben Haddou, via Telouet, mais avec mon pneu en mauvais état, j’ai décidé de descendre directement à Ourzazate. La descente est moins raide coté sud mais elle est très longue. Il faut encore beaucoup pédaler avant d’atteindre la ville.

En se rapprochant de Ouarzazate, le trafic augmente petit à petit, surtout les camions. Quand la descente est forte, un vélo roule plus vite qu’un camion (une question de freins) et inversement sur le plat ou dès que la route remonte un peu. Donc, un camion qui roule dans la même direction va vous dépasser et re-dépasser plusieurs fois. Autant directement se faire bien voir par le chauffeur.

Il y a aussi de nombreuses colonnes de 4×4 bariolés. Ceux-là sont souvent dangereux. L’effet de groupe sans doute.

Une fois en ville, les deux ou trois hôtels que j’avais noté ne me donne pas du tout envie. Un gaillard me propose de venir dormir dans une famille… mais tout cela ressemble à s’y méprendre à une proposition de la même veine que mon ami belge de tout à l’heure. Pourquoi ne pas tester le camping. D’après mon guide, il est correct.

Il est en effet très bien mais situé de l’autre coté de la ville, c’est donc à la nuit tombante, et bien fatigué, que j’y arrive. Il fait noir à 18h00 à cette époque de l’année.

J’ai à peine le temps de monter la tente que les occupants du camping-car d’à coté m’invitent à prendre le thé (un vrai et chaud). Pour tout vous dire, ils ont du en refaire trois fois car en bon cycliste assoiffé par une journée de montagne, j’ai vidé la réserve qu’ils avaient prévue pour la soirée en quelques gorgées. Le paquet de biscuit d’apéritif a disparu encore plus rapidement. Cela fait trois jours qu’ils me dépassent (je me lève tôt) et me re-dépassent (ils roulent plus vite et s’arrêtent plus souvent). Des gens très sympathiques qui connaissent bien le Maroc et que je croiserais encore les deux jours suivants.

Comme je n’avais rien à manger, j’ai pris, à pied, la direction du centre ville. En cours de route, je me suis fait abordé 3 fois par des gus qui avaient chacun un hôtel, un gîte ou une excursion extraordinaire à proposer. Un peu fatiguant à la longue. Surtout qu’aucun ne se posent la question de ce que je suis en train de faire là. Je suis juste un touriste donc un portefeuille à roulettes.

Jour 3 : Ouarzazate – Agdz : 85 km

Après avoir acheté un nouveau pneu tout à fait correct, je prends la N9 en direction d’Agdz. La route est un peu monotone excepté les 25 derniers kilomètres. Les 4×4 qui roulent en direction du sud et du désert sont de plus en plus nombreux et un peu envahissants… mais, tout compte fait, je roule dans la même direction, avec le même objectif. Peut être suis-je envahissant pour d’autres ?

J’arrive tôt à Agdz. Il fait beau et il y a un camping à 2 kilomètres de la ville. Ce sera beaucoup plus agréable pour une petite sieste au soleil que l’hôtel local.

En fin d’après midi, je retourne en ville pour acheter quelques provisions pour le lendemain. Je m’arrête sur la place. J’ai à peine le temps de souffler que je suis, une fois de plus, affublé d’un nouvel ami…

C’est reparti pour le baratin complet.

Marchand : Tu viens d’où ?
Nicolas : De Belgique
Marchand : J’ai un ami belge qui vient souvent ici (ici = dans mon magasin).
Nicolas : Désolé, mais je ne vais pas acheter de souvenir car je ne suis qu’au début de mon voyage. Je ne vais pas m’encombrer de poids supplémentaire.
Marchand : Je veux juste t’offrir le thé.
Nicolas : Merci, mais ce n’est pas nécessaire car je cherche juste à acheter à manger.
Marchand : Refuser le thé c’est offenser Dieu !
Nicolas : Bon, si c’est Dieu qui s’en mêle, je m’incline mais je ne vais rien acheter.
Marchand : Ce n’est pas important.
Nicolas : (tout bas) Mon œil !

Me revoilà dans un magasin de souvenir. J’aurais aussi pu partir en lui disant qu’il me casse les pieds mais pourquoi venir dans ce pays si c’est pour ne parler avec personne.

Cette fois-ci le vendeur est plus sympathique et le thé est chaud. Il a aussi des chèches « Made in China » mais lui les utilise pour ne pas se brûler avec sa théière.

C’est un grand amateur de troc. Il est prêt à échanger tout type de vêtement de sport moderne contre des bijoux anciens. Malheureusement pour lui, j’ai encore besoin de ma veste coupe-vent ou de mon pantalon !

Retour au camping où ils proposent à tous les pensionnaires, c’est-à-dire les occupants de 3 camping-cars, un délicieux et gigantesque couscous pour un prix dérisoire. Les camping-caristes qui m’ont offert le thé à Ouarzazate sont là également. Aujourd’hui, nous partagerons le couscous et de nombreux souvenirs de voyages. Contrairement à ce que l’on peut penser des camping-caristes quand on est à vélo, ce ne sont pas tous des pantouflards, loin de là.

Dans la bagarre, j’ai oublié la douche. Entre temps, le soleil s’est couché et la température a sérieusement baissée. J’avais pourtant vu la petite pancarte « Pas d’eau chaude ». Ce sera donc une douche froide par une température plus froide encore. Finalement après quelques secondes, l’eau est quand même chaude. Comme souvent au Maroc, rien n’est vraiment très clair mais finalement cela fonctionne.

Jour 4 : Agdz – Zagora : 118 km

Départ à l’aube et même un peu avant car il faisait encore tout à fait noir. De toute manière, il n’y avait plus moyen de dormir entre les chiens qui hurlent à la mort un bonne partie de la nuit, le coq déboussolé qui chante à 2 heures du matin et la mosquée toute proche… Dans ce pays, il vaut mieux aller dormir tôt car les nuits sont parfois très bruyantes.

Après 3 kilomètres sur la N9, je suis passé sur la rive gauche du Draa. Au début, c’est une petite route qui traverse une série de villages. La route est noire de monde car c’est l’heure d’aller à l’école. Il y a énormément de vélos. Heureusement, ils vont dans le sens inverse car habituellement à chaque dépassement, je suis obligé de faire un peu la course. Ils ont l’air de trouver cela très amusant. Ce n’est pas un problème quand il y a quelques vélos, mais avec des centaines, ce serait un peu dur !

Très vite la route se transforme en piste. Un fantastique itinéraire qui longe la palmeraie. Pour être certain de suivre la bonne route, j’avais chargé dans mon GPS tous les points et les cartes correspondantes. Comme la piste était facile à suivre, je n’ai pas jugé utile de sortir le GPS. Grave erreur, car au premier village, j’ai suivi la piste principale qui m’a renvoyé directement sur la grand route située de l’autre coté de la rivière.

Heureusement, j’ai pu récupérer la piste quelques kilomètres plus loin. Ensuite, le GPS n’a plus quitté le guidon. Avant cela, je n’avais jamais été vraiment convaincu par l’utilisation du GPS à vélo. Lire la carte, s’arrêter lors des changements de directions, demander sa route, etc… cela fait partie des plaisirs du voyage à vélo. Après ce voyage, je dois avouer qu’un GPS est quand même très pratique si les bonnes informations sont téléchargées avant le départ.

Toute l’après-midi, j’ai roulé sur une superbe piste traversant des paysages désertiques et des villages parfois à moitié abandonnés. Elle est de temps à autre un peu caillouteuse mais quand même fort agréable.

Les enfants, souvent nombreux, sont très calmes et pas du tout collants contrairement à ce que je m’attendais. Là aussi, le GPS est très pratique. Choisir sa route sans hésiter donne une certaine assurance et évite de se faire surprendre. Devoir faire demi-tour et repasser dans un village, c’est déjà beaucoup plus difficile à gérer.

A Zagora, j’ai été une fois de plus dans le camping local. Il est bien sympathique et très accueillant jusqu’à l’arrivée d’un groupe en 4×4 qui est venu installer un véritable bivouac au milieu du camp. Nouvelle nuit bruyante ! Heureusement, j’ai toujours avec moi des bouchons pour les oreilles.

Pourquoi dormir dans un camping me direz-vous ? Les voyageurs à vélo ne sont ils pas censés faire du camping sauvage ou, au moins, dormir chez l’habitant ?

Pour la douche ! S’en passer n’est pas un problème mais pourquoi s’en priver. Le camping permet aussi, plus facilement qu’à l’hôtel, de nettoyer et contrôler son vélo après une longue journée. Passer la nuit à l’extérieur permet aussi d’être directement habillé en fonction des condition du jour et, en hiver, d’être moins gêné par le froid en début de journée. A part quelques campings qui sont fermés la nuit par des grilles (en Europe), il est généralement possible de partir très tôt sans difficultés. Ce qui est rarement le cas à l’hôtel.

Pour moi, le camping sauvage ne se justifie que lors de très longues étapes. Sinon, c’est beaucoup plus agréable d’aller dans des endroits où il y a du monde, surtout que je voyage seul. Pour ceux qui font un très long voyage, il peut également y avoir des raisons budgétaires mais pour 2 semaines dans un pays où les campings coûtent moins de 5 EUR et les hôtels généralement moins de 20 EUR, cela n’a pas vraiment de sens.

Jour 5 : Zagora – M’Hamid : 118 km

Inutile de signaler que je suis parti très tôt mais cette fois c’est avec l’espoir de profiter d’un beau lever du soleil… et je ne serais pas déçu.

Après un arrêt devant le célèbre panneau « Tombouctou 52 jours », j’ai repris la direction du sud par une piste qui longe la rive droite du Draa. Après Zagora, la N9 est située sur la rive gauche. Cette piste était, avant la construction de la route, le principale voie d’accès à M’Hamid.

Très intéressant tout cela, mais encre faut-il trouver le début de cette piste. Toute la zone est une gigantesque carrière de sable. Il y beaucoup de camions (et de poussière) et de nombreuses traces qui partent dans toutes les directions. Heureusement, il y a une ligne électrique qui permet de s’y retrouver sans trop tourner en rond.

Ensuite, c’est une interminable ligne droite qui traverse un plateau désertique. Le sable a envahi la piste. Ce n’est pas du tout évident d’avancer dans ces conditions. J’ai donc rapidement opté pour le hors piste. Il y a beaucoup de cailloux mais la progression est plus efficace. Pour ceux qui passerais par là, il vaut mieux opter pour le coté droit de la piste car il y de nombreuses traces où le sable est bien tassé mais pas encore creusé. Très vite j’ai trouvé une piste qui semblait être une trace de moto mais qui devait être celle de multiples passages de vélos locaux. C’est assez génial de rouler sur une très étroite piste cyclable (quelques centimètres) qui serpente entre les cailloux. Cette mini piste permet de rouler à plus de 15 km/h au lieu des 8 km/h en hors pistes.

La piste rejoint la N9 juste avant le col qui traverse le Djebel Bani. Dans ce coin, il y a plusieurs villages. J’ai eu la malchance de passer à coté du terrain de football local. En moins d’une seconde, tous les joueurs, c’est-à-dire presque tous les enfants du village étaient après moi.

Monsieur, un stylo ? Jusque là, j’avais été un peu épargné par cette phrase magique. Ici par contre, à la traversée de chaque village, je suis directement assimilé à un distributeur de stylo ambulant. C’est du moins l’image que je semble donner. Pourtant, je n’ai pas la moindre réserve de stylo avec moi, excepté celui avec lequel j’ai écrit ces lignes.

Cette phrase va me suivre pendant presque tout les reste du voyage. La meilleure solution pour échapper aux bandes de mouflets est de s’arrêter pour tenter d’expliquer l’absence (inconcevable pour eux) du stock de stylo avant de continuer sa route comme si de rien n’était. C’est souvent plus facile à dire qu’à faire…

Certains demandent le sacro-saint stylo mais d’un air un peu distrait. Ce qui les intéresse, ce sont les bagages. Ils scrutent avec une impressionnante concentration tout ce qui pourrait être mal attaché. Dans ces cas-là, pas besoin de tenter le diable. Quelques coups de pédales énergiques et ils finissent rapidement par lâcher prise.

La N9 fait un grand détour pour traverser le Djebel Bani. De mon coté, j’avais prévu de continuer à suivre le Draa par une série de pistes pour rejoindre Tagounite par l’est.

N’ayant aucune idée de la durée que me prendrait cet itinéraire, j’avais emporté de quoi passer une nuit dans la montagne ou dans le désert (C’était le 31 décembre). Ce ne fut pas nécessaire car la piste principale a été récemment macadamisée. Ce qui m’a permis de rattraper rapidement le temps perdu le matin sur la mauvaise piste (« perdu » n’est pas vraiment le bon mot !).

Ensuite, il ne me restait plus qu’à trouver la piste pour rejoindre Tagounite. Rien de plus facile car il y même un panneau indicateur. Donc, pas besoin de sortir GPS.

Dans le premier village, je retombe sur une bande de « Monsieur, un stylo ». Comme j’ai eu ma dose pour la journée, je ne m’arrête pas et continue ma route. Je remarque juste qu’à partir d’un moment, ils ne crient plus que « Monsieur » tout court. Je comprendrais vite pourquoi. Je n’avais pas pris la bonne route. Me voilà perdu au cœur d’une palmeraie.

Une fois de plus, le GPS fera des merveilles. Je repère directement la direction à suivre pour rejoindre la piste principale. Après une petite demi heure à pousser le vélo, je pourrais à nouveau continuer en direction de Tagounite.

Après Tagounite, il reste encore 25 km pour atteindre M’Hamid par la N9. Ma première idée était de dormir à Tagounite et de faire l’aller et le retour jusqu’à M’Hamid le lendemain, mais pourquoi ne pas continuer directement pour profiter d’une journée complète, sans bagages, dans le (début du) désert. Aussitôt pensé… aussitôt décidé !

C’est un peu fatigué, car il y a encore un col à franchir, que je suis arrivé à M’Hamid. Fatigué mais content ! Comme je n’avais plus le courage de continuer, je me suis arrêté dans un camping situé à l’entrée de la ville.

Je m’attendais à trouver un peu de monde mais rien, personne, pas un chat. Pourtant l’endroit à l’air moderne avec une superbe piscine parfaitement entretenue. Après un peu de patience (car ici, il ne faut pas « chercher » mais « patienter » car tout fini par arriver !), le gardien a fini par apparaître. Il ne parle que quelques mots de français, les même que je connais en arabe : Couscous, tajine… Bref, tout ce qu’il faut pour se comprendre. Il y a une dizaine de tentes berbères bien équipées, toutes disponibles. Ce sera donc encore une nuit sous tente mais dans un vrai lit cette fois.

A minuit (c’est le 31 décembre), il y a un peu de musique dans le camp ou l’hôtel d’à coté. Je me suis donc trompé d’adresse. Bien que, vu mon état de fatigue, une bonne nuit de sommeil m’a fait le plus grand bien.

Jour 6 : M’Hamid – M’Hamid : 53 km

Avant de prendre la direction du désert, il me faut trouver à boire et à manger. Pas de difficultés, 1er janvier ou pas, les épiceries sont toujours ouvertes.

Par contre, ce qui est moins courant c’est de croiser un européen debout à l’aube en cette première journée de l’année. Sa présence s’explique rapidement. C’est aussi un cycliste. Il vient de faire la piste de Foum Zguid à M’Hamid en trois jours. Il profite de son passage à M’Hamid pour avoir une journée de repos avant de continuer son voyage.

Pour moi, pas de journée de repos au programme. La tempête de neige du 24 décembre en a décidé autrement. Si je veux voir tout ce que j’avais prévu, je n’ai pas une seconde à perdre.

A M’Hamid, la route macadamisée s’arrête. C’est une piste de sable qui continue en direction des dunes de Chigagua et du lac Iriki (asséché). Les 15 ou 20 premiers kilomètres de cette piste sont quasiment impraticables à vélo, dixit le marocain qui voulait m’embarquer, moyennant finance, à bord de son pick-up.

Pour ma part, j’ai choisi de suivre une autre piste qui suit le lit asséché de la rivière Draa. Je me suis procuré les points GPS correspondants à cette piste. Bref, je n’avais plus qu’à suivre les instruction de cette petite boite magique. Dans la pratique, ce ne fut pas aussi simple car les trois premières heures, je n’ai pas arrêté de pousser le vélo.

J’ai fini par rejoindre la piste principale qui devient vite de plus en plus praticable. A la fin, c’est même tout à fait génial car le sable est lisse et dur. L’idéal pour avancer au cap et à toute vitesse.

Une seule petite déception, le désert n’était pas désert du tout. D’abord la piste principale est une vraie autoroute. Des dizaines de 4×4 se suivent à des vitesses infernales soulevant d’immenses nuages de poussière. Certains sont un peu surpris de me voir là et ralentissent un peu. Il y aussi de nombreuses « caravanes » de chameaux qui transportent le matériel de bivouac de tous les amateurs qui ont passé la nuit du réveillon dans le désert. Et, bien sûr, il y a toujours des enfants prêts à vous subtiliser tous les stylos que vous pourriez avoir en votre possession.

Après seulement 30 kilomètres (à 9 km/h de moyenne), je suis bien obligé de faire demi tour. Non sans m’être promis de revenir pour faire cette piste jusqu’au bout et avec les bagages.

Le retour sera plus dur car je n’ai pu m’empêcher de suivre la piste principale jusqu’à M’Hamid pour la comparer avec celle que j’avais emprunté le matin. Conclusion, il y a encore plus de sable mou que je l’imaginais. C’est à la limite du praticable, même à pied.

Juste avant l’arrivée à M’Hamid, les enfants changent de tactique. Au lieu de demander gentiment des stylos, ils installent de véritables barrages avec des troncs d’arbres dans l’espoir, un peu vain, d’arrêter un 4×4. C’est un jeu, bien entendu, et je les comprends un peu car à force de voir passer des dizaines de véhicules tout terrain plus impressionnants les uns que les autres, la tentation d’en arrêter un juste pour voir ce que cela fait doit titiller leur imaginaire.

Tout cela reste bon enfant, jusqu’à l’arrivée un peu incroyable d’un cycliste. Impossible de contourner le barrage dans le sable mou, je suis donc obligé de me jeter dans la gueule du loup. Ils ont tous abandonné leur poste pour me suivre. Pas moyen d’accélérer dans le sable pour se débarrasser de cette bande bien sympathique mais un peu envahissante.

Cette fois, il ne demande pas de stylos mais de l’argent pour acheter un ballon. Me voyant assaillis de toute part quelques voitures s’arrêtent pour voir si tout va bien. Ils ouvrent juste un peu la fenêtre avant de repartir… Bien sûr, que tout va bien. Je ne vais quand même pas avoir peur que quelques enfants. Ils m’ont même bien fait rigoler jusqu’au moment où ils se sont mis à ouvrir les sacoches (sacoche de guidon et sacoche à outils sous la selle).

J’en ai vu un partir avec mes pinces démonte-pneus mais pas moyen de lui courir derrière sans risque de retrouver mon vélo complètement désossé. Un peu frustrant d’autant plus que je remarquerai plus loin que ma lampe de poche a également disparue. C’est dommage mais comme je l’ai dis plus haut, ce n’est pas facile de leur en vouloir.

De retour dans ma tente berbère, je me suis effondré sur le lit touchant à peine au tajine journalier. J’ai fait, je n’ose pas dire roulé car j’ai marché une bonne partie du temps, à peine 55 km. Une courte journée par rapport aux autres mais que de souvenirs.

Jour 7 : M’Hamid – Zagora : 94 km

Une journée un peu moins excitante car je suis retourné à Zagora par la route cette fois. Soit presque le même itinéraire qu’il y a deux jours mais sans quitter le macadam.

A part les deux cols en début de journée, la route est un peu monotone. D’autant plus que j’ai un peu une indigestion des « Bonjour Monsieur, un stylo ? ». A Zagora, il n’y a pas que les enfants qui s’y mettent, il y a plein de rigolos qui veulent faire ami-ami juste pour demander de l’argent.

Bref, ce jour là, je n’avais pas trop envie de jouer. Je me suis donc contenté de faire les kilomètres, de trouver un bon hôtel, de bien manger, de faire des provisions et d’aller dormir tôt car le lendemain une très longue est au programme.

Jour 8 : Zagora – Foum Zguid : 128 km

C’est parti pour une très longue journée. Je n’étais pas du tout sûr d’arriver au bout. J’avais donc emporter avec moi de quoi passer le nuit sur la bord de la piste.

Cette inquiétude ne venait pas de la longueur de la piste mais du nombre incroyable d’informations contradictoires que l’on trouve au sujet de cette route sur internet. Cela va de l’itinéraire sans intérêt à la route dont tous les ponts ont été emportés par les dernières pluies en passant par la piste très cassante. Dans la réalité… C’est un peu de tout cela mais rien de vraiment insurmontable.

Pour mettre le maximum de chance de mon coté, je suis parti vraiment très tôt. Il faisait encore nuit. Ce n’est jamais simple de partir très tôt quand on longe à l’hôtel (sauf dans les hôtels de luxe mais ce n’est pas vraiment celui que j’avais choisi). La porte d’entrée (ou plutôt de sortie) est généralement fermée à clé et le vélo est souvent dans un autre local tout aussi fermé à clé. Bref, il faut trouver quelqu’un. Le soir j’avais bien prévenu que je voulais partir au plus tard à 6h00 et que je devais accéder à mon vélo avant. Pas de problème, il y a le gardien.

Comme je m’y attendais, le lendemain, il n’y avait pas de gardien. J’ai fini par le retrouver profondément endormi dans un des canapés du salon TV. Heureusement qu’il ronflait sinon je ne serais jamais parti à l’heure.

J’étais très tôt sur la route mais je dois aussi dire que j’avais été dormir très tôt en prévision de cette journée. J’avais même choisi un hôtel avec salle de bain privée, pas le grand luxe mais quand même un peu de confort après une semaine sous la tente. Résultat de cette bonne et longue nuit : La baisse de moral du jour précédent n’est plus qu’un lointain souvenir.

Revenons à la N12, puisque c’est la route dont il s’agit. Les 7 premiers kilomètres sont sur du macadam, les 48 suivants sont une assez bonne route en gravier, ensuite, il y a 20 km d’enfer sur une piste de très gros cailloux, avant un deuxième tronçon de 48 km de route en gravier mais en très mauvais état. Pour terminer, il ne reste plus que 5 km sur une agréable route macadamisée.

Les paysages pourraient être considéré comme monotones mais ces espaces immenses et vides, personnellement, j’aime beaucoup.

A mi-parcours, j’ai croisé deux autres cyclistes dans la direction opposées. Ils n’avaient pas trop le moral. Ils allaient commencer la plus mauvaise partie de la piste et n’avaient pas vraiment des vélos adaptés (roues de 700).

En fin de compte j’ai roulé 9h00, soit un peu moins de 15 km/h de moyenne mais même avec les arrêts, je suis arrivé avant la tombée du jour. Cela peut paraître une peu particulier de rouler comme un forcené mais j’aime avoir de temps en temps un petit challenge (une piste difficile, un col, …). Cela aide à rester motivé quand l’on voyage seul.

A Foum Zguid, il y a un camping qui propose également 2 ou 3 chambres. J’ai choisi une chambre car je n’avais pas encore trouvé de nouvelle lampe de poche. C’est le super bricolage mais le responsable des lieux fait le maximum pour bien accueillir ses hôtes.

Jour 9 : Foum Zguid – Taznakht : 88 km

Une très jolie route peu fréquentée (à cette période de l’année). C’est également le retour en montagne avec quelques belles côtes.

J’avoue avoir roulé le plus vite possible pour atteindre Taznakht car la fatigue de la journée précédente n’était pas encore tout à fait assimilée.

Taznakht est une petite ville pas du tout touristique situé sur la nationale. Rien de bien extraordinaire à se mettre sous la dent si ce n’est de nombreuses scènes de la vie marocaine de tous les jours.

Jour 10 : Taznakth – Aoulouze : 134 km

Après une nuit dans le genre d’hôtel que je n’aime pas : Gardien qu’il est impossible de réveiller même après 08h00 et pâle petit-déjeuner, j’ai pris la N10 en direction de Taroudant et Agadir.

La route est très belle et peu fréquentée. C’est une immense ligne droite avant de descendre du Taliouine mais les superbes paysages compensent largement.

Aoulouze est située sur la nationale mais une nouvelle route, plus directe, a été construite pour rejoindre directement Taroudant. L’endroit n’est donc pas touristique et les prix s’en ressentent. 40 dirhams – 3,50 EUR – pour une chambre avec salle de bain commune. La décoration est sommaire mais c’est propre et fonctionnel (que demander de plus ?).

Une petite balade dans la rue principale vaut la peine et, plaisir suprême, tout le monde vous fout la paix.

Jour 11 : Aoulouze – Ouirgane : 147 km

Le dernier gros morceau du voyage : Le col du Tizi-n-test (2100 mètres d’altitude).

Avant de rejoindre le début, de la montée, il y a encore une longue ligne droite de +/- 30 km. Ensuite, c’est parti pour 120 km de route de montagne…. principalement en montée.

Avec les arrêts, il faut compter au moins 5 heures pour la montée et il est difficile de ne pas s’arrêter à chaque tournant tant les vues sont superbes.

Résultat des courses, je ne suis arrivé au sommet que vers 16h00, soit 2 heures avant le coucher du soleil.

Il est possible de camper au sommet mais mon objectif était de trouver un hôtel pour faire le lendemain une journée sans bagages.

Un mauvais plan car je n’ai trouvé l’hôtel que vers 18h00, soit après 1 heure dans le noir sur une route de montagne. Heureusement, pour une fois, ma dynamo de moyeu n’a pas fait de difficultés car ma lampe frontale a été volée (voir jour 6)… En plus, c’était un hôtel « chic » plus cher que le montant qu’il me restait en liquide et qui n’accepte pas les cartes de crédit.

Jour 12 : Ouirgane – Ouirgane : 74 km

Le programme de la journée se réduira à trouver un distributeur pour obtenir de quoi payer ma note d’hôtel.

De toute manière, la motivation n’y est plus. J’ai atteint tous les objectifs prévus et tout ce qu’il me reste à faire c’est rentrer à la maison avec le vélo dans le meilleur état possible.

Jour 13 : Ouirgane – Marrakech : 95 km

Même si je ne suis plus motivé, je n’ai pas pu m’empêcher de faire un détour en passant par Amziz pour atteindre Marrakech et ainsi de profiter d’une dernière petite route de montagne. Une route loin d’être de tout repos. 35 km d’un itinéraire qui monte et descend sans arrêts entre 1000 et 700 mètres d’altitude.

Ensuite, c’est une très longue ligne droite entre les hôtels, les villas et les golfs en construction. Le trafic est de plu en plus oppressant.

A 14h00, je suis dans ma chambre d’hôtel et j’avoue avoir fait la sieste tout l’après-midi.

Retour : Marrakech – Aéroport : 6 km

Le trajet pour l’aéroport est très court. Il y a toute la place pour démonter le vélo en paix sur le parking.

Pour le retour, j’ai du payer 40.00 EUR pour le vélo. En me renseignant avant le départ, de Bruxelles, Royal Air Maroc m’avait répondu que le prix pour le vélo devait correspondre au supplément de poids en plus des 30 kg autorisés. Mes bagages de soute, vélo inclus, ne dépassaient pas les 30 kg. Je pensais donc ne pas avoir de supplément à payer. Réponse du préposé quand je lui fait remarquer qu’à l’aller je n’ai rien payé : Ce sont des incompétents à Bruxelles!

Bref, rien de vraiment très clair

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